Compte rendu de l’intervention de l’ATMF dans l’un des ateliers de la rencontre nationale de la CIMADE.
les 9 et 10 octobre 2015 à Martigues.
L’ATMF représentée par Saïda Schreiner d’Aix-en-Provence, a participé à l’atelier « Les personnes étrangères au cœur de nos actions de sensibilisation » un des six ateliers programmés par la Cimade dans le cadre de leur rencontre nationale autour de « sensibilisation, la bataille de l’opinion publique ».
Il nous a été demandé de parler des types d’actions de sensibilisation propres à l’ATMF et la place qu’occupent les personnes qu’elle accompagne. Que font ces personnes concrètement ? Consommateurs, simples témoins ; construisent elles elles-mêmes les outils de sensibilisation ?…
Une action particulière doit être décrite et développée comme exemple avec l’évocation des avantages et des difficultés rencontrées et bilan.
Saïda Schreiner est intervenue au nom de l’association dans cet atelier à deux reprises (le 9 et le 10 octobre) avec la présence d’une cinquantaine de personnes.
Elle a d’abord présenté l’ATMF National et ses différents objectifs et finalités. .
Ensuite, elle a cité brièvement certaines actions de sensibilisation de l’opinion propres à l’ATMF et d’autres qu’elle mène collectivement avec ses partenaires (collectifs, associations de droits de l’Hommes, militants…) tout en soulignant l’importance d’impliquer les personnes concernées (les sans papiers, les vieux migrants, les étrangers, les réfugiés, les personnes discriminées…) dans ces actions.
En dépit des difficultés que rencontre ce public pour s’engager dans ces actions, le principe demeure pour l’ATMF National et ses différentes associations membres de « faire avec ». L’ATMF est toujours soucieuse de faire s’impliquer les personnes concernées dans la mise en œuvres des actions de sensibilisation : conférences débats, marche de soutien, manifestations… Simples témoignages émanant des vieux migrants, des sans papiers, des réfugiés, des victimes de discrimination, du racisme…par exemple sont pris en considération sans pour autant négliger un travail de mobilisation de ce public pour une meilleure participation.
L’exemple de l’atelier d’écriture qui a donné naissance à un outil de sensibilisation appelé « cercle de parole » a été expliqué en évoquant les étapes de son évolution. C’est une expérience issue de l’Espace femmes de l’ATMF d’Aix en Provence.
Les premiers écrits des femmes étaient des textes autobiographiques. Ce fut la première étape primordiale qui a débuté en 2007.
Elle s’est révélée comme un acte libératoire. Parler de soi, construire un récit, parler de son vécu migratoire, ont fait surgir des souvenir douloureux qu’il fallait surmonter pour passer à autre chose. Lire son texte à voix haute était difficile, un moment chargé d’émotion et qui a été facilité par le respect de l’autre, le non jugement et les échanges intersubjectifs. Le passage du « je » intime au « nous » des relations, de la communication, ont aidé les femmes à construire un groupe solidaire et cohérent.
Il s’en est suivi les écrits des monologues. Une étape décisive. Les mots ont acquis une nouvelle dimension. Les femmes se sont donné le droit d’être écoutées sur scène devant un large public pour dénoncer les injustices dont elles et les autres femmes ici et ailleurs sont victimes : La discrimination sur le marché de l’emploi, l’exploitation des femmes sans papiers, la violence qu’elles subissent sans pouvoir la dénoncer de peur d’être expulsées…
L’écriture des scénettes et leur mise en scène ont permis par la suite aux femmes d’être davantage déterminées. Elles s’informent sur la réalité de la société, se posent des questions sur le monde qui les entoure, sur ses enjeux. En saisissant les valeurs et les causes défendues par l’ATMF, ces femmes ont pris conscience de la situation des vieux migrants, des sans papiers, de différentes formes de racisme, de discrimination et du non respect des droits de l’Homme dont ceux de la femme ici et ailleurs.
Des scénettes ont été donc écrites sur les Chibanis en soulignant leurs situations dégradées et leurs droits ignorés. D’autres ont concerné la précarité des femmes âgées immigrées et non immigrées en dénonçant les inégalités femmes-hommes qui sont souvent à l’origine de ce phénomène de précarité qui touche plus de femmes que d’hommes. D’autres scénettes ont été écrites et jouées sur la discrimination, le racisme…
La lecture des textes a été enfin combinée avec une danse contemporaine. Les mots et le corps parlent ! Le cercle de parole est né et devient incontournable.
Il se déplace pour « parler en dansant » dans d’autres espaces publics et citoyens dont les forums sociaux, la journée de la femme, le festival Nuit Danse organisée par la Marie Hélène Demaris chorégraphe… Il continuera à dénoncer les injustices, à s’informer, à informer et à mobiliser d’autres femmes à libérer la parole.
Plusieurs questions ont été posées dans la salle : comment le groupe de femmes a-t-il été fidélisé ? Comment ces femmes ont elles formé un groupe cohérent ? Quelles sont les difficultés rencontrées? Avez-vous pensé à mobiliser les hommes pour adhérer à ce cercle ? Y a-t-il un travail envisagé avec les écoles ? Quels avantages ce cercle de parole a-t-il pour l’ATMF ?
Pour répondre à cette dernière question, il a été souligné que l’écriture et le cercle de parole ont permis aux femmes participantes de passer du statut de la victime intériorisée au statut exprimé d’acteur. On n’est pas citoyen sans libérer la parole et passer à l’agir. L’accès des femmes à la citoyenneté est en effet l’un des objectifs de l’ATMF.
Saida/ATMF